dimanche 7 février 2010

UNE "DECLARATION DE GUERRE" ADRESSEE AUX COLLECTIVITES LOCALES

Au cours du débat d'orientation budgétaire du Conseil général du Pas-de-Calais, les élus communistes en ont appelé à résister par les actes aux menaces que fait peser sur lui une politique gouvernementale destinée à asphyxier et à corseter l'action de l'Assemblée départementale.


Au programme de la première session plénière de l'année du Conseil général du Pas-de-Calais qui s'est déroulée lundi, le débat d'orientation budgétaire a donné lieu à de nombreuses interventions de la part des élus de l'Assemblée départementale. Plus d'une vingtaine en trois heures sans compter le discours introductif du président Dominique Dupilet, l'exposé d'Alain Fauquet, rapporteur Général du Budget et l'analyse du représentant du cabinet de conseil en finances locales Klopffer traçant de sombres perspectives pour l'évolution des finances du Département.
En cause, «une déclaration de guerre que le président de la République et de sa majorité de droite et de droite extrême sont en train d'adresser aux collectivités locales» selon les termes employés par Dominique Watrin, président du groupe communiste au Conseil général. Une «déclaration de guerre» tenant dans une politique d'«asphyxie délibérée» menée par le gouvernement du fait, notamment, de la suppression de la Taxe Professionnelle, de l'accumulation d'une dette de l'Etat à l'égard du Département s'élevant, depuis 2004, à 700 millions d'euros - l'équivalent de la moitié de son budget annuel - et d'une réforme territoriale (RGPP) tendant à réduire les marges de manoeuvre des collectivités et à les transformer en simple agences d'exécution de la volonté gouvernementale.
«Il y a une volonté claire, exprimée et calculée de mettre fin à ce que nous faisons, et de faire disparaître ce que nous incarnons par notre action» a expliqué Dominique Dupilet : «Cela a commencé tout doucement par le biais de la non-compensation des transferts de compétences. Route, transfert des TOS, réforme de la petite enfance, RMI puis RSA : on nous a tué à petit feu, on nous a saigné progressivement. Le premier coup, c'est celui de la suppression de la taxe professionnelle qui nous prive de l'autonomie fiscale qui permettait d'ajuster nos budgets en fonction de la conjecture et des besoins. Si la taxe professionnelle sera compensée en 2010, l'incertitude est totale pour 2011. Le deuxième coup, le pire, c'est celui de la réforme territoriale qui, avec la fin de la clause générale de compétences, nous interdira d'agir dans bien des domaines.» Un constat partagé par la plupart des représentants socialistes de la majorité du Conseil général avec un maître-mot au cours de leurs interventions : «résistance». Une volonté de «résistance» affichée devant se traduire en actes ont souligné pour leur part les élus du Groupe communiste.

Résister par des actes

«Nous sommes allés à Paris. Nous nous sommes adressé aux élus. Nous avons lancé une pétition. Aujourd'hui, la lutte doit pouvoir s'amplifier» a expliqué Bruno Troni, maire de Billy-Montigny et élu du canton de Noyelles-sous-Lens. «Profitons de ce débat d'orientation budgétaire pour réaffirmer notre refus d'être placé sous tutelle de l'État et notre volonté de continuer à oeuvrer avec les communes pour être plus près des habitants, de leurs besoins et de leurs ambitions. Servons-nous de la préparation budgétaire comme d'un bras armé pour demander le retrait des réformes et faire échec à celles en cours. Lettres aux maires, aux associations, pétitions... Amplifions le mouvement, mobilisons concrètement les maires sur le devenir des aides et des coopérations à venir entre les Communes et le Département et plus généralement entre les collectivités» a surrencheri Martial Stienne du canton de Vitry-en-Artois. «Ce n'est pas à nous de nous auto-censurer, de renoncer à mettre en oeuvre les politiques départementales nécessaires à la population du Pas-de-Calais» a souligné pour sa part Jean-Claude Juda, maire de Saint-Etienne-au-Mont et conseiller général représentant le canton de Samer : «Ce n'est pas au Département de «serrer les boulons» alors que l'État ne rembourse pas ses dettes et réduit notre capacité financière. Son objectif est de réduire la dépense publique pour donner toujours plus d'argent aux riches de ce pays ! Ce n'est pas le nôtre !» «L'action, les actes, voilà les priorités du Groupe communiste dans les sept semaines qui nous séparent du vote du budget. Oui à une manifestation départementale avec les forces vives de notre territoire ! Oui à une manifestation nationale rassemblant toutes les associations d'élus, tous les maires, tous les conseillers généraux de France, seul moyen de faire plier le gouvernement ! Oui à un budget qui préserve en priorité les ménages ! » a martelé Dominique Watrin.

Un défi pour le Département

«Dans le cadre de ce débat d'orientation budgétaire a-t-il expliqué. Nous sommes confrontés à un défi d'une tout autre dimension que celui des années antérieures. Ce qui est inédit dans la situation actuelle, c'est que nous ne devons pas faire face, comme les années précédentes, à une ou plusieurs difficultés supplémentaires pour boucler le budget départemental mais à une attaque frontale. Tout d'abord contre les Communes sommées de déléguer l'essentiel de leurs compétences et de se dissoudre dans des entités incontrôlables par les citoyens. Avec des ressources fiscales amputées de centaines de millions d'euros, c'est un mauvais coup porté contre les projets d'aménagement des Communes et des Intercommunalités qui s'inquiètent à juste titre de voir les aides départementales diminuées. C'est un mauvais coup contre l'éducation populaire et la prévention dans les quartiers et les villages avec des associations culturelles et sportives qui craignent à leur tour la perte de subventions. C'est un mauvais coup contre les ménages du Pas-de-Calais et le monde ouvrier. Après la taxe carbone qu'ils devront acquitter en lieu et place des 1018 sites industriels les plus polluants qui en sont aujourd'hui exemptés, après le bouclier fiscal pour les plus riches, voilà maintenant le bouclier fiscal des grosses entreprises mis à la charge des salariés ! C'est un mauvais coup aussi contre le monde de l'entreprise. La suppression de la taxe professionnelle profitera aux grands groupes industriels mais que feront les actionnaires avec cette manne financière ? Cesseront-ils par exemple leur délocalisation ? Par contre, les entreprises de travaux publics, du bâtiment, les artisans sont déjà affectés par le ralentissement de l'activité. L'incertitude financière qui pèse sur les collectivités locales les amène en effet à mettre le pied sur le frein de leurs investissement qui représentent 75 % de l'investissement public. Et puis, il faudrait parler aussi de l'explosion prévisible de la cotisation foncière acquittée par les PME, les commerçants et artisans avec le passage progressif à la valeur vénale pour son calcul»

Un piège

«La droite nous tend volontairement un piège en nous plaçant dans la situation d'avoir à assumer la responsabilité politique d'une augmentation lourde des impôts où à des coupes sombres dans nos politiques volontaristes» a conclu le président du Groupe communiste au Conseil général du Pas-de-Calais : «Le gouvernement veut mettre au pas les collectivités locales et les instrumentaliser dans la mise en place d'un super plan d'austérité dont pâtiraient encore la population et les territoires les plus défavorisés.» Le vote du budget départemental interviendra mi-mars, au cours de la prochaine session plénière du Conseil général.

Jérôme Skalski

Publié dans Liberté 62 n°899

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